14. La mauvaise réputation [les banques, 1/∞]

Publié le 13 août 2014 par Pouhiou et Gee

Voici le premier épisode d’une série sur les banques. C’est un tel vivier à bastardises qu’il est impossible de dire combien d’épisodes nous leur consacrerons, ni de citer toutes les personnes qui nous en ont parlé… Mais merci à vous pour l’inspiration..

L’on pourrait croire que le concept d’image de marque est une invention de connards destinée à drainer l’argent des entreprises vers des agences de com aux méthodes aussi chaotiques que celles d’un souffleur de verre atteint de hoquet. Et c’est en effet le cas. Il n’empêche que le fait est avéré : si votre entreprise jouit d’une bonne réputation, tous les narratifs qu’elle va proposer seront acceptés et donc rentables. Car on ne vend pas un produit ou un service : on vend un narratif. Cette assertion est parfaitement illustrée par le cas des banques.

Pour arriver, par exemple, à faire avaler les couleuvres des produits financiers, ces contrats basés sur la croyance magique que l’argent a des petits bras musclés et peut travailler à votre place ; il faut être un bon conteur, un de ceux à qui on a envie de prêter l’oreille. Les charlatans du XIXe siècle l’avaient déjà compris : c’est le bonimenteur le plus prestigieux, celui qui présente le mieux qui parviendra à écouler sa camelote dans les règles de l’escroquerie… C’est-à-dire en rendant le badaud heureux de vous donner tout son argent contre un peu de rêve.

Oui : les assurances, c’est le seul pari que vous y gagnez si et quand ça va très mal pour vous… Mais les esprits faibles et influençables (c’est à dire la majeure partie des gens) vont y souscrire juste pour se dire qu’ils n’en ont pas besoin. Pour perpétuer en eux ce narratif que les tuiles n’arrivent qu’aux autres ; que les angoisses peuvent se circonscrire en une option à cocher en achetant son billet d’avion ou son téléphone portable. Seulement, pour parvenir à dompter la peur afin qu’elle se réduise à quelques caractères minuscules et un surcoût de quelques euros par mois ; il faut un marabout puissant, un rebouteux à la réputation établie, un griot de confiance… Bref : l’inverse de l’image donnée actuellement par nos banques, et a fortiori nos assurances.

On le sait : les banques sont impopulaires, car elles captent votre argent et le traitent comme le leur… voire le traient régulièrement pour qu’il devienne, littéralement, le leur. Les assurances sont des escroqueries kafkaïennes où chacun peut vous expliquer en quoi la couverture que vous avez souscrite est constellée de trous en petits caractères ; mais où personne n’est responsable de cet état de fait.

Si vous voulez redorer l’image d’une telle entreprise, il ne faut pas vous boucher les oreilles et chanter très fort des « LA » en espérant que personne n’entendra les casseroles que vous vous traînez. Au contraire, hurlez avec les loups, crachez sur votre profession à pleine bouche pour montrer à quel point vous êtes loin de toute cette fange, au-dessus du panier de crabes, l’exception confirmant l’odieuse règle.

« Ce qu’on te reproche, cultive-le, c’est toi. »

Cocteau aurait pu faire un bon connard s’il n’avait pas eu la tête embourbée dans le Marais. Plus on s’empare des défauts que l’on nous connait, plus il est facile de les faire passer pour des clichés, interdisant à chacun de les penser… Sous peine de passer pour une personne simpliste, qui ne voit pas plus loin que ce qui est devant ses yeux. Cette règle est à la base des formations données aux conseillers clientèle de vos établissements financiers.

Pour se créer une nouvelle réputation, il faut partir de la mauvaise que l’on s’est construite au fil du temps. J’entends parler de « reconstruire une relation entreprise/client » et je me gausse : seuls des marketeux biberonnés au bullshit peuvent comparer une relation à un jeu de Lego. On ne « gagne pas la confiance » comme on gagne une affreuse peluche géante made in China à la Foire du Trône. Tout est question de posture : on se positionne comme digne de confiance, pour induire une relation anxiolytique. Et le meilleur moyen de réaliser un tel jeu de miroirs et fumées, c’est de se mettre en position de faiblesse, de dépendance.

Ne nous cachons rien, quand on a le coup de main, c’est simple d’enfumer la volaille moyenne afin qu’elle se laisse sereinement plumer. Avec un peu de talent, on peut aller plus loin en l’abrutissant de compassion et d’idéaux afin qu’elle fasse le boulot pour nous… C’est une joie rare pour un connard de voir un pigeon heureux de vous apporter ses plumes qu’il a soigneusement arrachées pour vous confectionner un édredon.

J’ai moi-même atteint ce but en rédigeant la campagne email à l’intention des « meilleurs clients de la LCLC ». Afin que vous en saisissiez toutes les subtilités, je vous transcris ce document via notre module de traduction de connardises, un outil actuellement en version bêta que nous espérons bientôt pouvoir proposer en complément de ces leçons.

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